Cesare Battisti : Fred Vargas, "Je lui dis bravo"

Fred Vargas, est écrivain, elle soutient Cesare Battisti et lui a consacré un livre "La Vérité sur Cesare Battisti" (Ed. Viviane Hamy, 2004)

Avez-vous été étonnée à l’annonce de la probable fuite à l’étranger de Cesare Battisti ?

 Ca m’a fait un coup mais je ne suis pas étonnée. C’est pas que je m’y attendais mais je comprends ce qui a pu se passer dans sa tête. Cesare a été poussé à bout. Après le 30 juin, il ne voyait plus à quoi se raccrocher. Il était devenu fragile, très vulnérable. Je parle à titre individuel car je ne suis en aucun cas le porte-parole de Cesare ; il ne restait que l’espoir de la Cassation, or cet espoir était juridique. Depuis le début de cette histoire, nous avons assisté à un effondrement de la loi française, la séparation des pouvoirs n’est plus respectée. Son arrestation le 10 février, fondée sur une fausse note des RG, était illégale. Son extradition l’est tout autant puisque toutes les cours d’Europe (sauf l’Italie) rend obligatoire un deuxième procès lorsque le premier s’est fait par contumace. Pourquoi Cesare n’a-t-il pas eu droit à un nouveau procès ? L’arrêt du 30 juin est une décision de non justice. Publicité Cesare n’est pas un criminel, il n’a jamais tué personne. Il l’a dit, cela a été rendu évident par son procès, mais personne ne l’écoute. Sa fuite n’est pas illégale car du moment que la France a écrasé le droit, c’est elle qui entre dans l’illégalité. Dans cette situation, j’estime que tout citoyen a le droit, voire le devoir, de réagir de manière "illégale". Dans le cas de Cesare, il s’agit de légitime défense. On aurait tous fait comme lui. Je lui dis bravo, et j’espère qu’on ne le retrouvera pas.

Cette situation ne risque-t-elle pas de rendre plus difficile la tâche de ses avocats ? N’aurait-il pas mieux fait de parier sur une annulation de la procédure d’extradition en Cassation ?

 Le travail de ses avocats était terminé, sa fuite n’y change rien. Il a peut-être mal parié, ou il a extrêmement bien fait, seule l’histoire nous le dira. On est en train de vivre un véritable tremblement juridique, la séparation des pouvoirs entre l’Etat et la justice n’existe plus. C’est très grave pour tous les citoyens. Cesare était très affecté et, même s’il gardait un espoir en appel, il se disait que ce n’était qu’un espoir sur 100.000.

Que pensez-vous de la proposition des Verts de lancer des initiatives de soutien en faveur des autres activistes italiens réfugiés en France ?

 Chacun adopte la stratégie qu’il considère comme étant la plus efficace. Moi, j’ai tendance à travailler en ligne. Je pense que tant que le cas de Cesare n’est pas réglé, rien ne peut arriver aux autres. Je travaille élément après élément, sinon je me perds. Pour l’instant, je me concentre sur le dossier Battisti, en gardant l’espoir qu’il fasse jurisprudence.

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